Demain, dès l'aube...
Demain,
dès l'aube, à l'heure où blanchit la
campagne,
Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m'attends.
J'irai
par la forêt, j'irai par la montagne.
Je ne puis demeurer
loin de toi plus longtemps.
Je marcherai les yeux fixés
sur mes pensées,
Sans rien voir au dehors, sans entendre
aucun bruit,
Seul, inconnu, le dos courbé, les mains
croisées,
Triste, et le jour pour moi sera comme la
nuit.
Je ne regarderai ni l'or du soir qui tombe,
Ni les
voiles au loin descendant vers Harfleur,
Et quand j'arriverai, je
mettrai sur ta tombe
Un bouquet de houx vert et de bruyère
en fleur.
Victor Hugo (1802-1885),
Les Contemplations, 1856